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C'est le genre de pièce dans laquelle le lit tient une place centrale non seulement par sa position mais aussi pour les propriétaires. On y fait tout. On y mange, on y dort, on y fume, on y parle, on y joue aux cartes, dans un silence morne, épuisé par la chaleur et l'ennui. La ville, à la fenêtre, crache, sue, des chats maigres se trainent dans la cour intérieure et des enfants leur jètent des bouts de pains, des os, des restes immangeables au lieu d'aller à l'école parce que l'école, c'est nul. Toute la journée, je reste sur ce lit, seule et triste, allongée, tripotant mes mains, agitant un livre sous mes yeux de temps en temps, pour avoir l'impression de faire quelque chose. J'essaye aussi de lire pour ne pas oublier. Oublier ce que j'étais, ce que j'ai appris avant d'être ici. Je fais quelque chose pour me rappeler que je suis ici, seule et triste, épuisée par la chaleur et l'ennui, dans cette ville qui crache et qui sue où des chats maigres marchent dans la cour intérieure avec des gamins qui leur jètent des ordures. Oui, des fois, je n'ai plus envie d'oublier, je me sens le courage de m'affronter, moi et mon échec. Mais mon courage, ma seule arme, est un voile léger qui se déchire à la moindre brise alors je lâche le livre bien vite et coule contre les oreillers pour croire à une illusion douce et moelleuse et non à une perte de temps insupportable qui me met en cage, envahit mon corps. La chambre est blanche, le sol carrelé, les armoires d'un joli vert d'eau et le matelas mauvais. Je m'y lamente toute la journée, geignant sur la mauvaise qualité des draps, la petitesse du miroir au-dessus du lavabo. J'y ai froid comme on a froid au fond du ventre en plein milieu du mois de Juillet. J'y suis une fille, une fille qui attend sur le lit, sans rien y faire, sans rien y dire. Il y a une seule fenêtre avec un petit balcon que je laisse toujours ouverte. Parfois, je pense à aller m'appuyer contre le rambarde, pour prendre l'air et le soleil, dorée ma peau qui doucement, inexorablement, se décolore à la lumière des néons blafards de la pièce, mais je ne bouge pas. Les conversations des grosses femmes, dans un espagnol argotique que je ne comprend pas, me parviennent et me rappellent leurs costumes, ces grandes jupes bariolées en tissu épais, vulgaire. J'aimerai avoir une grosse voix comme elles, des colères comme elles, la rage de vivre comme elles, j'en rêve dans mon peignoir en polyester noir, dans un soupir résigné. Je suis comme un chat, un gros chat paresseux qui ne bouge jamais. Je suis un meuble de la maison, chaud et doux, qu'on caresse en rentrant en pensant à ses soucis, en espérant trouver un peu de réconfort au creux de l'animal silencieux.
Je te lance des paillettes. Dis toi que j'ai trop de devoirs aussi..... mourir.